mardi 8 septembre 2009

Le Jeu de l'Ange de Carlos Ruiz Zafón

Quel écrivain n’a jamais rêvé d’écrire le livre ? Celui qui déchainerait les foules, passionerait les critiques, et qui déclencherait des guerres et des tueries. C’est ce qu’un homme mystérieux aux prunelles noires et à la gueule de loup demande à l’écrivain David Martín : « lui écrire un livre n’ayant jamais existé ».

Dans la fantastique Barcelone des années 20, entre un amour impossible et une amitié perdue, David n’aura de cesse de rattraper ses erreurs.C’est alors qu’il découvrira que l’homme mystérieux a tout d’un Méphisto aux ailes noires. Et même si son âme est déjà perdue, il fera tout pour protéger les personnes qui lui sont chères du destin funeste qui les attend. Mais la vérité n’est pas toujours celle que l’on croit…

Carlos Ruiz Zafón est un véritable prodige de la mise en scène et de la narration ; Il s’interroge avec pertinence sur la place de l’écrivain dans la société et offre un renouveau au genre fantastique. Il est parfois difficile de savoir où commence le rêve et où s’arrête la réalité dans ce livre tant l’auteur excelle à emporter le lecteur exactement là où il veut. Les personnages sont allégoriques, et sont habilement associés à des thèmes particuliers qui leurs délivrent une humanité encore plus importante. Isabella peut donc réprésenter la jeunesse et la vivacité d’esprit là où Cristina est assimilée à la pureté et à la détresse amoureuse. Il y a véritablement plusieurs genres qui s’enchâssent dans ce roman, d’une part le fantastique qui reste présent tout au long du récit, mais également le policier qui prend une place plus grande à mesure que l’histoire se dévoile. On peut également évoquer le récit autobiographique fictif car ce récit est conté à la première personne par l’intermédiaire du héros David Martín.

Le style de l’auteur (tout du moins du traducteur) est agréable à lire et à entendre, les passages narratifs sont bien construits et le lecteur n’est pas sujet à la somnolence récurrente que provoquent certains romans actuels. Il y a là un travail conséquent de la part du traducteur qui cherche à reproduire le souffle de l’auteur et qui, au vu du résultat, a parfaitement réussit son contrat. Les descriptions des lieux invitent le lecteur à se les imaginer et l’on se prête parfois à rêver des vieilles rues de Barcelone. Les lieux jouent d’ailleurs une place centrale dans le roman car ils sont à l’image de leurs habitants, comme si ils n’étaient qu’une partie du corps des personnages.

Les mauvaises langues pourront dire ce qu’elles veulent, Le Jeu de l’Ange est bien une réussite et même si la ressemblance avec son prédécesseur L’Ombre du Vent est flagrante, il n’a rien à lui envier. Le cadre est identique et les personnages tout aussi attachants mais cette fois l’auteur a créé une somptueuse fresque littéraire où se croisent un Don Juan amical, une princesse malheureuse, une jeune mégère non apprivoisée, un assassin cherchant à échapper à son destin, un vieux libraire attachant, un Mephisto à l’allure de dieu de la mort et un écrivain talentueux mais déchu qui peut se transcender en ange.

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