mercredi 23 novembre 2011

Le Petit Poucet des temps modernes

L’enfant Océan, Jean-Claude Mourlevat

Pocket Jeunesse

Dans ce roman jeunesse publié pour la première fois en 1999, le lecteur suit une famille de sept frères, partis en pleine nuit pour fuir un danger.

Cette fratrie est constituée de trois paires de jumeaux de 14, 13 et 11 ans, ainsi que de Yann, le petit dernier, âgé de 10 ans. Ce dernier est, contrairement à ses frères, de nature chétive, mesure à peine quatre-vingt-dix centimètres et est muet. Pourtant, c’est lui qui préviendra ses frères que leurs parents veulent les tuer, lui qui organisera leur périple jusqu’à l’Océan et leur donnera les directives pour survivre jusqu’à leur but.

Ce roman se présente sous la forme d’un interrogatoire. Chaque personne ayant croisé la route de ces enfants raconte, de son point de vue, ce qui s’est passé : les six garçons ainsi que leurs parents, l’assistante sociale, la boulangère qui leur donna du pain, une retraitée, etc. Yann n’interviendra qu’une fois, à la fin de l’ouvrage, pour donner des indications supplémentaires sur les causes de leur départ.

L’auteur a réussi à faire passer, grâce au langage soutenu ou encore grossier, la place qu’occupe ces personnes dans la société. Ainsi, la mère Doutreleau s’exprime de façon vulgaire, avec des expressions particulières :

« La fille, je l’attendais. Vu que Doutreleau y’avait foutu le cartable à la baille, au gosse, ça pouvait pas finir autrement. Y pousse Doutreleau, mais faut le comprendre. Quat’fois qu’on l’appelait, le gosse, pour venir manger la soupe. »

Le lecteur passe donc aisément d’un récit à l’autre, en pouvant distinguer facilement qui parle. Au sein même de la famille, grâce à ces différentes façons de s’exprimer, on distingue également le caractère des personnages. On peut citer par exemple les cadets, qui ont une façon plus violente que leurs aînés de s’exprimer, étant de nature plus agressive.

Ce roman rappelle par touches le célèbre conte du Petit Poucet. En effet, le chemin menant à leur maison s’appelle « Chez Perrault », le petit Yann ressemble étrangement à Poucet ou encore leur destination finale se trouve être la maison d’un père de sept jeunes filles. Cependant, les comparaisons s’arrêtent là, l’auteur n’ayant pas écrit une réadaptation du texte, mais bien une critique de la société actuelle. Cet ouvrage peut se lire à partir de 10 ans, mais en grandissant, le lecteur comprend plus facilement la détresse de ces enfants.

Atteindre un but, vivre par ses propres moyens, s’occuper de ses frères… Ce sont des « activités » que ne devraient pas vivre des enfants de cet âge. Pourtant, on remarque la maturité dont ils font preuve, leur intelligence et l’envie de se protéger mutuellement, tout en gardant leur innocence.

Ce roman est une belle histoire de famille, où les enfants montrent leur capacité à se débrouiller seuls, sans l’aide d’adultes incapables de les protéger. Tout en se terminant « bien » pour la fratrie.

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