mercredi 21 septembre 2011

Drames d'une famille parfaite, dans Rien ne s’oppose à la nuit, de Delphine de Vigan, chez JCLattès.

Rien ne s’oppose à la nuit est le sixième ouvrage de Delphine de Vigan. Dans ses titres précédents, elle avait déjà distillé par bribes la personnalité de sa mère, mais en l’atténuant, comme dans No et moi.

Cette fois, sa famille est le sujet principal de l’ouvrage, et plus particulièrement sa mère. Pour cette biographie, elle se fonde sur ses propres souvenirs, mais également sur des interviews des membres de sa famille, avec toujours ce souci de raconter « sa » Lucile, sa mère telle qu’elle l’a connue. Écrire cette biographie était un réel besoin pour Delphine de Vigan, une obligation, pour mieux comprendre pourquoi elle-même tentait toujours d’être différente en tant que mère.

Pour la petite histoire, cet ouvrage nous plonge dans la vie d’une famille nombreuse en apparence heureuse, mais qui a vécu de nombreux drames, comme le décès accidentel du jeune Antonin, à six ans (l’origine des malheurs de cette famille), des suicides, un possible inceste, le handicap, etc. Ces évènements ont marqué chaque membre de la famille, mais ils se sont tous plus ou moins relevés de ces drames, certains moins bien que d’autres.

Delphine de Vigan évoque à de nombreuses reprises une biographie de Lionel Duroy, Le Chagrin, qui, en révélant son enfance et les travers de ses parents, est aujourd’hui détesté par sa propre famille. C’est pourquoi elle se demande souvent si évoquer tel ou tel pan de la personnalité d’un proche est dérangeant pour les autres, puisque chacun a sa propre perception de ces histoires de famille.

Le récit alterne entre la première personne du singulier, lorsque Delphine de Vigan intervient dans l’histoire, avec ses souvenirs et son avis, et la troisième personne du singulier, lorsqu’elle imagine la vie que sa mère devait avoir, en mettant toujours en évidence qu’il s’agit de sa propre interprétation, et en aucun cas une vérité établie. Elle établit donc une distinction entre la fiction et ses souvenirs réels.

La folie, l’absence d’une mère en tant que telle sont des thèmes récurrents, puisque l’auteur elle-même fait tout pour ne pas ressembler à cette mère, tout pour ne pas avoir la même attitude envers ses filles, quitte à les surprotéger.

Cet ouvrage montre le coté sombre d’une famille « ordinaire », ses bons et mauvais moments, sans tomber dans le voyeurisme. On partage ses malheurs, on souffre avec ces personnes réelles, car la fin est déjà expliquée au début de l’ouvrage, telle une tragédie antique.

Ainsi, on anticipe chaque drame, tout en espérant se tromper.

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